L'exploration des archives semblant trouver son public, je continue la recension des vieux numéros de Casus Belli. L'idée initiale était de combler le "trou" entre les billets d'Anniceris et les posts de Vociferator sur CasusNo : j'arrêterai probablement ce type d'article au numéro 37, le devoir de mémoire ayant été remarquablement assuré par d'autres.
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Le numéro 29 de Casus Belli est sorti en novembre 1985. Derrière une couverture de Patrick Dermuth, il nous offre 80 pages consacrées au jeu de simulation. Ce sont les incontournables Nouvelles du Front qui ouvrent le bal, avec d'abord le calendrier des manifestations passées et à venir. Une petite brève signale le record du monde de la plus longue partie d'AD&D, avec 61 heures et 39 minutes. Ce record (décroché par des joueurs belges) a-t-il été battu depuis ?
Dans des colonnes, proches, le résultat du CB Echo donne une cartographie intéressante des lecteurs de Casus Belli de l'époque et, par extension, de la population rôludique de ces années. C'est ainsi qu'on découvre que 90 % des joueurs ont entre 13 et 24 ans et que 63 % joue depuis plus de deux ans et ce, une ou deux fois par semaine !
Dans les nouveautés annoncées, on relève l'arrivée d'Oriental Adventure (sic) et de Jorune ainsi, au rayon des magazines, celui du Bimestriel des Terres Médianes et du Drame de la Rue des Récollets, ainsi que de L'énigmatique Carnet du Capitaine Pop Plinn, tandis que le premier numéro de Dragon Radieux est classé dans la catégorie Zines.
La très utile rubrique Inspirations délivre sa livraison de conseils littéraires, ainsi qu'une interview de Michel Jeury. Suit une autre interview (plus écrite et fantaisiste) du président d'un club de jeu (l'A.J.T.), pas forcément indispensable, avant les têtes d'affiche qui se penchent sur (excusez du peu) les règles "expert" de D&D, SpaceMaster, Flashing Blades et Judge Dredd, entre autres. Encore une belle cuvée, non ?
Vient ensuite la partie "wargame" du magazine sur laquelle je passe vite : y sont évoqués Opération Crusader, et Marita Merkur (de la série Europa), à réserver aux passionnés de la deuxième Guerre Mondiale. Puis viennent NATO et Red Storm, qui se penchent sur un éventuel troisième conflit planétaire, le premier étant plus réaliste que le second. Notons qu'à l'époque, les eighties encensées par toute une génération, cela n'avait rien d'improbable. Les deux blocs se faisaient encore face, à grand renfort de gros missiles.
Après la rubrique Ludotique, qui évoquent des jeux pour ZX Spectrum, Apple II, Commodore 64 et Atari (eh oui), un article revient sur Battle System et Warhammer, qui n'est encore qu'une règle de batailles avec figurines. Dans cet article, on trouve aussi un inventaire d'autres règles destinées à simuler ces combats : le cordon ombilical entre wargame et jeu de rôle n'est pas encore coupé.
Après une petite BD (que j'ai toujours compris comme un private joke casusien), on retrouve la rubrique Devine qui vient dîner ce soir, avec un dessinateur qui fera date : Thierry Ségur.
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Après une petite nouvelle (signée Amédée Adifas), et comme annoncé en couverture, ce numéro présente une nouvelle classe de personnage : la courtisane, avec une illustration de Didier Guiserix qui vaudrait aujourd'hui une volée de bois vert (ou une flamewar, soyons modernes) au magazine... quoique. Avec le recul, il est vrai qu'on peut se questionner sur la pertinence de pareille proposition. Le public rôludique de l'époque était surtout masculin et d'un âge où l'on a plus d'hormones que de neurones...
Vient ensuite la description d'une auberge (Le gastéropode hystérique), agrémentée de quelques astuces d'aménagements (sur les cheminées et les escaliers, notamment). Cette mise en bouche laisse ensuite place à un long et bel article sur Pendragon par Denis Gerfaud (oui, le créateur de Rêve de Dragon), avec une petite interview du grand Greg Stafford. Inutile de dire que ces pages ont une vraie valeur patrimoniale.
L'article suivant décrit la gamme James Bond 007, alors que sortait sur les écrans A view to a kill (attention, ce lien va vous faire voyager dans le temps), et que le jeu n'avait pas encore été traduit dans le langue de la DGSE. Très complet, il propose aussi une aide de jeu, avec les caractéristiques d'un véhicule (la Range Rover) et des tables de conversion des unités anglosaxonnes en celles du Système International.
Au rayon des scénarios, on en trouve trois : Pacifiquement Vôtre pour James Bond, L'acrobate pour Rêve de Dragon (par Denis Gerfaud et illustré par Thierry Ségur) et naturellement un module pour AD&D, Le trésor de Trakanne. Le scénario JB007 (de Michel Serrat, l'auteur de l'article qui le précède) est annoncé comme pouvant faire suite à Bons Baisers de l'Enfer, publié dans le numéro 23.
Ces trois scénarios m'ont laissé le souvenir d'une très grande qualité, même si je ne me rappelle pas les avoir joués ni fait jouer (le JB007 m'avait tenté, après avoir fait jouer Bons Baisers de l'Enfer) : c'était du beau matériel de jeu, qui mériterait d'être exhumé, je crois.
Ce beau numéro se conclut par une pleine page de publicité pour un jeu qui sent le soufre. Je ne résiste pas à la tentation et partage cette illustration.
A bientôt pour la suite de cette exploration temporelle !
> Ce record (décroché par des joueurs belges) a-t-il été battu depuis ?
RépondreSupprimerOh oui, à plusieurs reprises, dont la première était peut-être début 1987 à Clermont-Ferrand. Il me semble que la presse spécialisée en avait d'ailleurs parlé.
Je voulais dire 1986.
SupprimerPreuve à l'appui ! ;-)
Merci ! Voilà du complément d'information solide et sourcé, à verser aux archives historiques du JdR français.
SupprimerAh la courtisane... pour d'autres, je ne sais pas mais ça a été un PJ important : nous jouions n'importe comment, à l'époque, et une "nouvelle" classe avait beaucoup d'importance autour de nos tables. Ça a été le 1er personnage "pas de mon genre", qui m'a permis de vite réaliser que les clichésne permettent pas de jouer, pour ça il faut s'intéresser à qui l'on joue et se tenir prêt à subir des attitudes pas franchement bienveillantes de la part des autres joueurs. Dure mais salutaire expérience.
RépondreSupprimerEt oui, j'ai beaucoup fantasmé sur Roxane la rouge, rousse aux yeux verts, armée d'un fouet... et je souris en repensant à mes 17 ans ^^
Un excellent numéro, dans mon souvenir, pour 007 et le reste : j'avais commencé par le 32 puis j'avais trouvé ce n°29 ainsi que plusieurs autres après, je crois après la sortie de Laelith (n°35?) Bref. Merci pour cet article - et tous les autres 👍
Oui, Laelith, c'est bien le numéro 35, assez mythique pour moi aussi.
SupprimerMerci pour ce retour d'expérience sur cette classe de personnage : je ne suis pas sûr que tous eurent le même regard sur la courtisane. Bravo !
En réalité la courtisane était une classe avec un beau potentiel pour des aventures urbaines, à une époque où le PMT était encore la base de la plupart des « modules ».
RépondreSupprimerElle était d'ailleurs annoncée comme étant une sous-classe du voleur. J'espère qu'elle a pu exprimer tout ce potentiel sur certaines tablées !
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