dimanche 23 octobre 2022

Archéorôludisme

Ce qu'il y a de bien, avec le ménage de printemps d'été (oui, j'ai du retard), c'est qu'on remet la main sur des caisses pleines de vieux matériel. Tout récemment, j'ai ainsi exhumé mon antédiluvien classeur de feuilles de personnages (dont j'avais fini par me demander s'il n'avait pas disparu dans le dernier déménagement), ainsi que sur des tonnes de vieux scénarios. 

C'est ainsi que j'ai pu exhumer la toute première version de mon adaptation de La colline aux suicidés, d'après le roman de James Ellroy et qui, vingt ans plus tard (à la louche) alimenta la partie sur forum qui s'est terminée récemment. Ce scénario faisait partie d'une campagne utilisant la troisième édition de Berlin XVIII (je vous laisse calculer l'âge de ces documents) au cours de laquelle j'avais également proposé une adaptation (parcellaire) de L. A. Confidential. Hélas, à l'époque, comme bien souvent, cette campagne n'était pas allée jusqu'à son terme. En tout cas, une chose m'a sauté aux yeux : mes scénarios de l'époque étaient déjà très rédigés, ce qui n'est plus systématiquement le cas aujourd'hui. 

En continuant la fouille, je suis sûr que je vais mettre la main sur quelques autres vieux souvenirs, joués ou restés à l'état de projets. Je me demande si ça peut intéresser qui que ce soit (et mériter une mise à disposition). 


mercredi 19 octobre 2022

Les Jeux de Rôle en Terre du Milieu - troisième partie

Concluons aujourd'hui la série de billets consacrés à l'un des univers les plus exploités en JdR : la Terre du Milieu. Alors qu'est diffusée la très moyenne série Les Anneaux de Pouvoir, il me semble opportun d'évoquer cette histoire, en grande partie parce que c'est un univers qui m'est cher. 

Le naufrage d'Hexagonal entraîna la fin, pour un temps, de l'exploitation commerciale de la licence tolkiennisante. S'en suivit, de 2005 à 2010, une période floue où certains retournèrent vers le grand ancêtre MERP/JRTM, tandis que d'autres (dont votre serviteur) trouvèrent satisfaction dans l'offre "amateur". 

J'ai coutume de dire qu'on peut jouer des décennies en ayant acquis seulement un livre de base. Mais les licences les plus lucratives ne restent jamais longtemps sans être exploitées. La Terre du Milieu faisant partie des univers préférés de nombre de rôlistes, le filon n'était pas épuisé. 

Image 1jour-1jeu.com

En 2010, la nouvelle arriva du côté de Cubicle 9, éditeur connu pour son exploitation de la licence Doctor Who, notamment : une nouvelle incarnation rôludique de la Terre du Milieu naquit. Il s'agissait de L'Anneau Unique (The One Ring), écrite par un passionné de l'univers en question : Fransesco Nepitello (qui avouait que le jeu de Decipher lui collait la migraine). 

La traduction française de The One Ring est de toute beauté. Assurée par Edge, elle bénéficie en plus d'un suivi de gamme à l'avenant, avec des suppléments bien pensés, entre description des régions et propositions scénaristiques évitant le hors-sujet. 

Les illustrations (dont certaines de la main du grand John Howe) sont pour la plupart très belles et participent à donner le ton : enfin, nous sommes chez Tolkien et nul magicien surpuissant ou nulle créature incongrue ne va jaillir pour défendre son trésor. Côté système de jeu, le noyau du système est plutôt simple, puisqu'on lance 1D12 (dont deux des faces sont soit un Œil de Sauron, soit une Rune de Gandalf et viennent compliquer ou améliorer le résultat), auxquels s'ajoutent autant de D6 que la compétence sollicitée. En plus de faire vendre des dés spécifiques (une mode de plus en plus fréquente), cette motorisation tient a priori la route et est facile à mettre en œuvre (et à expliquer). 

Il y a aussi plein de bonnes idées dans l'Anneau Unique et je n'en dénombrerai que quelques unes : l'utilisation de phases d'aventure et de communauté, l'importance du voyage, l'ancrage géographique et temporel du jeu et les points d'Ombre, par exemple, sont autant de bons points pour l'Anneau Unique

Mais il y aussi quelques défauts, dans ce jeu, même s'il reste pour l'instant le meilleur des JdR "pro". C'est surtout son système qui pèche, notamment par la multiplication de micro-règles venant s'ajouter au moteur central (ce point de vue n'engage que moi) et quelques incohérences (mineures, certes). La simplicité et l'harmonie annoncée ne sont donc pas toujours au rendez-vous, en particulier lorsque vient le temps des combats (et ils sont nombreux, dans cet univers). 

Avoir confié le job à des admirateurs de l'œuvre fondatrice est sans doute le meilleur choix qui fût. Prendre comme époque de référence celle située entre Bilbo le Hobbit et Le Seigneur des Anneaux fut tout aussi judicieux. Très rapidement, L'Anneau Unique a séduit les fans et est devenu LE JdR dédié à cet univers. On les comprend : l'approche est la bonne, tant d'un point de vue mécanique (malgré les réserves que j'émettais sur le système) que de celui du choix temporel et géographique. 

Autour de ce jeu évident, d'autres produits vont tenter de s'imposer, sans grand succès. On pourra évoquer Aventures en Terre du Milieu (qui, lui aussi, exploite la période entre Bilbo le hobbit et Le Seigneur des Anneaux, avec le système de jeu de D&D5), édité également par Cubicle7, pour exploiter au maximum la licence compléter son offre et sans doute séduire les donjonneurs.

Image Philibert


Alors que la deuxième édition de L'Anneau Unique est sorti dans la langue de J.R.R. Tolkien et ne saurait tarder à arriver dans l'hexagone, on peut mesurer le chemin parcouru par cet univers rôludique incontournable. Et la publication d'une boîte d'initiation remarquablement bien faite est l'occasion d'embarquer dans cet univers de nouvelles recrues rôlistes. 

La Terre du Milieu n'a pas fini d'attirer les rôlistes. Pour eux, la route se poursuit, sans fin...

dimanche 16 octobre 2022

Nouvelles du fond

Et voici un nouveau bulletin d'informations rôludiques !

Vous hésitez entre la Sword and Sorcery  et la préhistoire ? Alors Paleomythic est peut-être le jeu qu'il vous faut. Utilisant un système semblable à celui de Tales from the Loop (assez mortel pour les personnages, mais pourquoi pas ?), ce jeu est en cours de traduction chez Pattern Recog (Warpland, Troïka) et devrait débarquer cet hiver. Pour une fois, le financement participatif en cours affiche (en plus d'un délai raisonnable) des contreparties limitées au strict nécessaire (livre de base, avec éventuellement une couverture rigide). 

La boîte d'initiation de L'Anneau Unique s'est vendue comme des petits pains (notamment à Octogônes, en passe de devenir LA convention française consacrée au jeu) : est-ce de bon augure pour la deuxième édition, qui sera assurée par Edge en France ? Toujours est-il qu'au vu de son contenu, c'est une vraie bonne affaire, si vous voulez vous lancer dans cet univers rôludique hors du commun. 

Si les numéros 2 et 3 d'Architeuthis ne sont toujours pas disponibles au téléchargement et qu'on pouvait craindre que c'en soit fini de ce magazine, le numéro 5 est parti à l'impression tout récemment et devrait arriver incessamment dans les boîtes des abonnés. Mon petit doigt me dit qu'il y aura un scénario de votre serviteur dedans. 

Enfin, si vous appréciez les récits de partie et que vous aimez aussi comprendre ce qui se passe de l'autre côté de l'écran, cette série de comptes-rendus peut vous intéresser. RuneQuest est un jeu à côté duquel je suis passé et je goûte tout particulièrement cette démarche. 

A bientôt, pour un autre flash infos !

jeudi 13 octobre 2022

Les Jeux de Rôle en Terre du Milieu - deuxième partie

On continue le panorama consacré aux jeux de rôle exploitant la Terre du Milieu, non exhaustif, je le rappelle, puisque se basant essentiellement sur mon expérience en la matière. 

Le vénérable MERP/JRTM n'a donc pas (chez moi en tout cas) franchi l'an 2000 et, quand l'envie vint de parcourir de nouveau la Terre du Milieu, c'est vers le JdR amateur que je me suis tourné. Il faut dire qu'en face, la proposition commerciale n'était guère alléchante : le JdR proposé par Decipher, jusqu'en 2007, ne rencontra jamais le succès attendu. 

Tiers-Âge, écrit par Jean-Philippe Jaworski (l'auteur du très beau Te Deum pour un Massacre) et accessible sur la Cour d'Obéron, était doté d'une jolie réputation. Disponible depuis 2000, il permettait (et permet toujours, d'ailleurs) de parcourir la Terre du Milieu sans avoir l'impression de piétiner l'œuvre originelle. Même s'il n'était pas dépourvu de lourdeurs (notamment au niveau des combats, souvent un peu longs), Tiers Age fourmillait de bonnes idées. Qu'il ait été réalisé par un amoureux du matériau d'origine y était sans doute pour beaucoup. On verra plus tard que c'est d'ailleurs l'une des clés de la réussite. 

Image Rakuten

Quelques idées sublimes parsèment ce jeu qui n'a finalement d'amateur que le nom. On citera notamment son approche de la Magie (fini, les listes de sorts de MERP) et la notion d'Echo Magique qui pouvait attirer l'attention de Sauron sur un PJ trop tenté d'utiliser cette fichue magie. De même, la possibilité de jouer des personnages ressemblant à ceux des romans (et non simplement de ceux qu'on croiserait dans n'importe quel donjon) joue en faveur de l'immersion. 

A titre personnel, je me suis dirigé vers Tiers Age d'abord par intérêt et amour de l'œuvre de Tolkien, et y ai fait jouer quelques scénarios (ceux de la campagne de l'Arthedain), avec un vrai bonheur. Quelques scénarios plus tard, cette campagne fut stoppée net, à l'instar de pas mal d'expériences rôludiques. J'avoue que je n'en connais plus trop la raison, mais les disponibilités du groupe de joueurs devaient y être pour quelque chose. En tout cas, le système de jeu ne fut pas invoqué pour cet arrêt. 

C'est alors qu'arriva La Terre des Héros, dont l'auteur, Olivier Legrand, me contacta afin de participer à la Chronique qu'il comptait démarrer. Ce fut une expérience formidable et le début d'une grande amitié (mais je m'égare), et également l'occasion pour moi de franchir un grand pas : oui, un jeu pouvait avoir des règles simples et parfaitement émuler le genre abordé. A propos de ce dernier, La Terre des Héros avait un ton résolument...héroïque, puisque les joueurs étaient amenés à y jouer des personnages dignes de figurer dans les légendes (de la stature de Faramir, par exemple). 

Image lotro.jeuxonline.info

A l'instar de ce qu'il proposa sur ses jeux suivants, Olivier déterminait le profil des personnages sur quelques Talents, déterminant leur carrière et qui pouvaient être testés avec un simple jet d'1D6. La notion de Destin était très présente également. La Terre des Héros a connu plusieurs éditions et quelques suppléments et est toujours disponible en téléchargement gratuit. En ce qui me concerne, j'ai vécu sur ce jeu deux de mes plus belles chroniques de toute ma longue expérience rôludique (si cela vous tente, les récits en sont disponibles sur le site d'Olivier Legrand). 

Ces deux jeux sont les jeux déclinaisons non commerciales que j'ai pu pratiquer à exploiter la Terre du Milieu. Il en existe probablement d'autres, mais Tiers Age et La Terre des Héros sont deux immenses réussites dont le secret me semble reposer sur un véritable amour de l'œuvre nourricière et sur des systèmes émulant cette œuvre et s'inspirant d'elle. 

Petit aparté : les deux pépites que sont La Terre des Héros et Tiers Age sont disponibles sur les sites de leurs auteurs. C'est tout naturellement vers eux que je vous engage à vous rendre pour les télécharger, et non sur les nombreuses autres plateformes qui les proposent (j'ai même vu un exemplaire imprimé de Tiers Age en vente sur un certain site d'achat/vente entre particuliers !). Ce n'est pas parce que c'est gratuit qu'il ne faut pas en faire profiter les auteurs.

Mais ce n'était pas terminé. A l'instar de la route qui se poursuit sans fin, le jeu de rôle en Terre du Milieu n'avait pas refermé son grand livre. 


samedi 8 octobre 2022

Sub Terra

Oui, je sais, j'ai un wagon de retard. Le jeu Sub Terra est sorti depuis belle lurette et la deuxième édition ne saurait d'ailleurs tarder à être disponible dans les meilleures boutiques. Mais, est-il jamais trop tard pour parler d'un jeu ? J'ai acquis Sub Terra, il y a quelques mois, dans une petite boutique de ma connaissance, sur les conseils du vendeur. Ce jour-là, j'avais envie d'un jeu coopératif et celui-là devait répondre à mon cahier des charges. 

Illustration Philibert


Dans Sub Terra, les joueurs incarnent des spéléologues qui se sont aventurés dans les entrailles de la terre et vont devoir retrouver la sortie et l'air libre. Mais, dans les galeries qu'ils parcourent, les dangers sont multiples : entre les boyaux étroits, ceux qui sont inondés, les secousses sismiques, la progression est difficile. Et puis, il y a les horreurs qui n'attendent que la venue des explorateurs pour se lancer à leur poursuite. 

Pour transformer ce pitch en jeu, Sub Terra propose d'utiliser des tuiles terrain, piochées au fur et à mesure de l'avancement des personnages, celle symbolisant la sortie étant parmi les dernières de la pioche. Les personnages disposent, quant à eux, de points d'action et, selon leur spécialité (garde du corps, plongeur, etc.), ont des spécificités qui les rend complémentaires (le garde du corps, par exemple, protège ses petits camarades en cas d'éboulement). Ces spéléologues sont fragiles et arriver à la sortie ne sera pas une mince affaire. Les premières parties se soldent souvent par un échec mais, apprentissage aidant, on progresse suffisamment pour espérer voir les personnages retrouver l'air libre... ou au moins certains d'entre eux. La difficulté est donc suffisamment bien dosée pour ne pas provoquer rapidement la lassitude. 
Image Philibert

Sub Terra réussit à tenir le difficile équilibre entre mécanisme et ambiance. Ses règles, relativement simples, ne sont pas de celles vous forçant à consulter le livret en cours de jeu et le simple fait de voir que le tas de tuiles ne descend pas assez vite instille la tension nécessaire. Si, en plus, vous utilisez une musique un peu angoissante (au hasard, la BO d'Aliens) et baissez la luminosité de la pièce, l'ambiance est au rendez-vous. Suffisamment difficile mais pas trop, Sub Terra réussit là où d'autres, plus punitifs (coucou Infernal Wagon) ont échoué. C'est donc une vraie réussite que ce jeu !

Des extensions sont disponibles, qui pourront renouveler le plaisir du jeu et ajouter de la difficulté si nécessaire, mais je n'ai pas encore acquis celles-ci (et ne suis pas sûr de le faire, le jeu étant suffisamment plaisant sans elles). Il est également possible d'acquérir les figurines qui viendront avantageusement remplacer les meeples (et les jetons représentant les horreurs de façon plutôt abstraite). 

Sub Terra
Auteurs : Tim Pinder
Illustrateur : Zak Eidsvoog
Edité par Nuts Publishing
Prix conseillé : 35€

jeudi 6 octobre 2022

Les Jeux de Rôle en Terre du Milieu - première partie

Ayant récemment vu se conclure une Chronique en Terre du Milieu, j'en profite pour livrer un petit retour d'expérience relatif aux jeux de rôle utilisant le monde créé par Tolkien. Il va sans dire que, sans Le Seigneur des Anneaux, notre hobby préféré n'aurait pas eu le même visage, du moins dans ses premières années. Rapidement, l'envie d'aller faire un tour dans les contrées décrites dans cette œuvre incontournable s'imposa. Mais, à l'instar du JdR historique, jouer dans la Terre du Milieu, d'un côté ou de l'autre de l'écran, c'est délicat.
Ou, comme je le dis souvent : jouer dans la Terre du Milieu, c'est un peu comme faire du jokari dans un magasin de porcelaine. C'est amusant, mais il faut être bien assuré. 

Remontons le temps, si vous voulez bien, et balayons quelques exemples d'exploitation rôludique de la Terre du Milieu. Let's do the time warp !

Longtemps, pour jouer dans la Terre du Milieu, il n'y avait qu'un mastodonte : MERP (Middle Earth Role Playing game), traduit en son temps en JRTM, sorti chez Iron Crown Enterprises et traduit en français par Hexagonal sous forme d'une boîte rigide. 

Illustration Rollforinitiative.com

Le système de jeu de MERP, aujourd'hui fort décrié à cause de sa complexité et de son simulationnisme (quoique), utilisait un système de bonus/malus à ajouter à un jet d'1D100, à comparer avec une l'opposition. Plus le score était élevé, mieux c'était, avec un système de coups critiques décrits dans des tables dont je me souviens avec émotion. 

A la réflexion, quitte à faire hurler dans les tavernes, je ne pense pas que ce jeu fut le plus complexe de ce panorama. Malgré une quantité notable de jets de dés et d'additions/soustractions à faire pour réaliser la moindre action, ce moteur (qui reste une version allégée de RoleMaster) avait au moins un mérite : utiliser toujours la même règle, à savoir un jet d'1D100 (sans limite) et d'y ajouter/soustraire les boni et mali applicables (qui pouvaient être nombreux, c'est vrai). C'était lourd, mais au moins, c'était toujours la même chose. 

Ce sont plutôt les choix faits par ICE qui me chagrinent, avec le recul. Très rapidement, les créatures et personnages non joueurs proposés, ainsi que les propositions d'aventure des différents modules partaient en "hors sujet" : la magie était assez accessible et puissante et les forteresses de la Terre du Milieu se changeaient en donjons peuplés de créatures gardant de gros trésors. Je me souviens encore du supplément décrivant la Moria et dont une proposition d'aventure consistait à s'y infiltrer pour prendre tout ce qu'on pouvait y prendre avant d'en ressortir vivant. Pour l'émulation du thème, on repassera. 

De plus, ICE avait fait le choix de ne pas directement exploiter la période "historique" du Seigneur des Anneaux et de placer ses suppléments aux alentours de 1640 TA (du Troisième Age), une période suffisamment peu décrite pour autoriser beaucoup. Avec le recul, ce choix n'était finalement pas pertinent : à quoi bon parcourir la Terre du Milieu, si ce n'était pas pour y apercevoir (voire participer) les hauts faits décrits dans l'œuvre fondatrice ?

Pour autant, je garde une véritable affection pour ce jeu, que j'ai pas mal pratiqué en tant que MJ, et une fois ou deux en tant que joueur. Avec ses combats qui pouvaient durer des heures, ses coups critiques parfois phénoménaux et ses créations de personnages où la chance pouvait donner des résultats surprenants, MERP/JRTM reste un jeu de son époque. Ce n'est pas pour autant que j'y rejouerais, cela dit. Ma dernière tentative sur ce support date de la fin des années 90, sur une petite Chronique qu'il faudrait que j'exhume, un de ces jours. 

En 2001, la licence perdue par ICE, juste avant sa faillite, est récupérée par Decipher. Ca tombe bien (ou pas, d'ailleurs), puisqu'une certaine trilogie est sur les écrans. Sorti en 2002, le jeu de rôle du Seigneur des Anneaux, motorisé par le système CODA, est dans toutes les bonnes boutiques. En France, c'est encore Hexagonal qui se charge de la traduction. 

Illustration Ludospherik


Le livre est beau (vous connaissez beaucoup de JdR med-fan avec des photos des créatures, armes et régions, vous ?) mais le jeu ne rencontrera pas un grand succès. La faute à quoi ? Son système, tout d'abord, visiblement à peine testé et complètement déséquilibré, et puis un choix éditorial qui hésite entre la visite du musée (où, surtout, on ne touche à rien) et le n'importe quoi (allez, je vous mets un vampire, puisque vous insistez). Et puis, c'est vraiment pas de chance : en 2007, l'éditeur américain ferme la porte, après un suivi assez médiocre de la gamme, visiblement pensée pour profiter de la vague cinéma (et pour vendre des cartes à collectionner).

A titre personnel, j'ai lu cet ouvrage, mais ne l'ai jamais utilisé. A l'époque, une solution plus élégante est disponible : il s'agit de Tiers Age, un jeu de rôle amateur (écrit par Usher, le futur auteur de Te Deum pour un Massacre, qui reprendra en partie le même système). 

Mais tout cela, ce sera pour le billet suivant. 

samedi 1 octobre 2022

Chronique en distanciel (et en Terre du Milieu), retour d'expérience

Voilà déjà pas mal de temps que j'ai été contacté pour participer à une campagne de JdR à distance (utilisant les plates-formes Discord et Roll20) dans la Terre du Milieu. Motorisée par l'Anneau Unique, elle fut l'occasion pour moi de découvrir ce mode de jeu et les arcanes de ce jeu. Cette chronique va bientôt se terminer, après une vingtaine d'épisodes. C'est toujours un moment particulier, parfois chargé d'émotion, que le celui où le rideau tombe, et je remercie au passage mes petits camarades de jeu, et en particulier celui qui tint le rôle de Maître de Jeu. Chapeau, l'ami !

Cette conclusion est aussi l'occasion de faire un retour d'expérience, à la fois sur le jeu en distanciel et sur le JdR qui fut utilisé. Je commence par mon ressenti sur le jeu à distance, puisque je compte consacrer un billet (ou plusieurs) aux jeux de rôle exploitant la Terre du Milieu (enfin, ceux que je connais, pour commencer)

Précisons tout d'abord que ce ressenti est tout à fait personnel (oui, cette phrase est redondante, mais on ne sait jamais). Le jeu de rôle "en ligne" a ses fans et ses détracteurs et ceux-ci ne se retrouveront sans doute pas dans mes mots. Inutile de déclencher une guérilla pour cela, s'il vous plaît. D'autre part, quantité d'actual-plays, c'est-à-dire de parties filmées et mises à disposition sur la toile sont des parties en ligne : il est donc facile de se faire une petite idée en quelques clics. En attendant, voici mon impression et quelques petits conseils.

Illustration roguewatson.com


En tant que joueur, il m'est arrivé d'être passif pendant une période marquée, tout simplement faute de ne pas trouver ma place dans le flot (notamment lors de palabres). Dans le cas d'un personnage à la limite du taiseux, ce n'est pas en soi dramatique, mais d'une manière générale, une certaine discipline doit s'imposer : tous les joueurs doivent pouvoir parler, quitte à ce que les plus volubiles se gendarment eux-mêmes. Ceci est vrai pour des tables en "présentiel", et l'est encore plus en "distanciel". Mais, faute de disposer du langage corporel, le MJ pourra oublier un joueur un peu discret. Regarder les gens avec qui l'on joue via l'image souvent pauvre de la webcam ne suffit pas à être alerté. 

Toujours dans le domaine du contrat ludique, se mettre d'accord en amont sur la dose de mécanique et de roleplay est important. A mon sens, c'est la deuxième composante qui devrait l'emporter, mais chacun fait comme il entend. Il me semble tout de même vital de ne pas se laisser happer par la mécanique. A l'instar du point précédent, j'ai la nette impression que le jeu en distanciel amplifie les handicaps rencontrés en présentiel : un joueur peu présent l'est encore moins, un joueur envahissant l'est encore plus, et il en est de même pour le ratio roleplay/mécanique. 


Maîtriser en ligne est, à mon sens, plus épuisant que sur une table. En plus de garder un œil (fût-il mental) sur le déroulé du scénario, il faut rester attentif à chacun des participants, gérer les jets de dés, afficher les informations nécessaires et tenir l'ambiance. La technique, si elle se veut facilitante, est finalement source d'un travail supplémentaire pour le MJ. A titre personnel, j'utilise Roll20 pour partager des images (essentiellement les portraits des PNJ, parfois des décors) et pour les lancers de dés (ou plutôt de dé, puisque je maîtrise des JdR mono-dé). Eventuellement, cette plate-forme va me servir pour la lecture d'une plage musicale (quand j'ai un générique), mais cela n'ira pas plus loin. Il m'est arrivé de maîtriser avec uniquement Discord, voire Zoom (à la pire époque du confinement) et ça s'était plutôt bien passé. 
Illustration geekbecois.com


Le MJ, à moins d'avoir un cerveau rompu à la souplesse, devrait donc savoir limiter les options qu'il utilise. L'évolution des caractéristiques des PJ et PNJ (leur santé, par exemple) peut se faire "hors-écran" : une feuille de personnage interactive et remplie "en direct", c'est bien dans les jeux vidéos, mais pas impératif en JdR. 

A bien y réfléchir, ces choix, à discuter avant de se lancer dans l'aventure ne sont ni plus ni moins que ceux qui gouvernent (plus tacitement) le jeu en présentiel. J'ai la nette impression cependant qu'à distance, ils ont un impact amplifié, comme si la distance augmentait les défauts et (parfois) diluait les avantages. 

Ces réflexions sont sans doute celles d'un vieux routard du JdR (qui assume, merci), mais reflètent quelques enseignements que j'ai pu tirer de mon expérience. Je continuerai à maîtriser en distanciel, parce cette proposition permet de réunir des joueurs géographiquement éloignés, mais la pratique en présentiel gardera ma préférence pour l'instant.