Ayant récemment vu se conclure une Chronique en Terre du Milieu, j'en profite pour livrer un petit retour d'expérience relatif aux jeux de rôle utilisant le monde créé par Tolkien. Il va sans dire que, sans Le Seigneur des Anneaux, notre hobby préféré n'aurait pas eu le même visage, du moins dans ses premières années. Rapidement, l'envie d'aller faire un tour dans les contrées décrites dans cette œuvre incontournable s'imposa. Mais, à l'instar du JdR historique, jouer dans la Terre du Milieu, d'un côté ou de l'autre de l'écran, c'est délicat.
Ou, comme je le dis souvent : jouer dans la Terre du Milieu, c'est un peu comme faire du jokari dans un magasin de porcelaine. C'est amusant, mais il faut être bien assuré.
Remontons le temps, si vous voulez bien, et balayons quelques exemples d'exploitation rôludique de la Terre du Milieu. Let's do the time warp !
Longtemps, pour jouer dans la Terre du Milieu, il n'y avait qu'un mastodonte : MERP (Middle Earth Role Playing game), traduit en son temps en JRTM, sorti chez Iron Crown Enterprises et traduit en français par Hexagonal sous forme d'une boîte rigide.
Illustration Rollforinitiative.com |
Le système de jeu de MERP, aujourd'hui fort décrié à cause de sa complexité et de son simulationnisme (quoique), utilisait un système de bonus/malus à ajouter à un jet d'1D100, à comparer avec une l'opposition. Plus le score était élevé, mieux c'était, avec un système de coups critiques décrits dans des tables dont je me souviens avec émotion.
A la réflexion, quitte à faire hurler dans les tavernes, je ne pense pas que ce jeu fut le plus complexe de ce panorama. Malgré une quantité notable de jets de dés et d'additions/soustractions à faire pour réaliser la moindre action, ce moteur (qui reste une version allégée de RoleMaster) avait au moins un mérite : utiliser toujours la même règle, à savoir un jet d'1D100 (sans limite) et d'y ajouter/soustraire les boni et mali applicables (qui pouvaient être nombreux, c'est vrai). C'était lourd, mais au moins, c'était toujours la même chose.
Ce sont plutôt les choix faits par ICE qui me chagrinent, avec le recul. Très rapidement, les créatures et personnages non joueurs proposés, ainsi que les propositions d'aventure des différents modules partaient en "hors sujet" : la magie était assez accessible et puissante et les forteresses de la Terre du Milieu se changeaient en donjons peuplés de créatures gardant de gros trésors. Je me souviens encore du supplément décrivant la Moria et dont une proposition d'aventure consistait à s'y infiltrer pour prendre tout ce qu'on pouvait y prendre avant d'en ressortir vivant. Pour l'émulation du thème, on repassera.
De plus, ICE avait fait le choix de ne pas directement exploiter la période "historique" du Seigneur des Anneaux et de placer ses suppléments aux alentours de 1640 TA (du Troisième Age), une période suffisamment peu décrite pour autoriser beaucoup. Avec le recul, ce choix n'était finalement pas pertinent : à quoi bon parcourir la Terre du Milieu, si ce n'était pas pour y apercevoir (voire participer) les hauts faits décrits dans l'œuvre fondatrice ?
Pour autant, je garde une véritable affection pour ce jeu, que j'ai pas mal pratiqué en tant que MJ, et une fois ou deux en tant que joueur. Avec ses combats qui pouvaient durer des heures, ses coups critiques parfois phénoménaux et ses créations de personnages où la chance pouvait donner des résultats surprenants, MERP/JRTM reste un jeu de son époque. Ce n'est pas pour autant que j'y rejouerais, cela dit. Ma dernière tentative sur ce support date de la fin des années 90, sur une petite Chronique qu'il faudrait que j'exhume, un de ces jours.
En 2001, la licence perdue par ICE, juste avant sa faillite, est récupérée par Decipher. Ca tombe bien (ou pas, d'ailleurs), puisqu'une certaine trilogie est sur les écrans. Sorti en 2002, le jeu de rôle du Seigneur des Anneaux, motorisé par le système CODA, est dans toutes les bonnes boutiques. En France, c'est encore Hexagonal qui se charge de la traduction.
Illustration Ludospherik |
Le livre est beau (vous connaissez beaucoup de JdR med-fan avec des photos des créatures, armes et régions, vous ?) mais le jeu ne rencontrera pas un grand succès. La faute à quoi ? Son système, tout d'abord, visiblement à peine testé et complètement déséquilibré, et puis un choix éditorial qui hésite entre la visite du musée (où, surtout, on ne touche à rien) et le n'importe quoi (allez, je vous mets un vampire, puisque vous insistez). Et puis, c'est vraiment pas de chance : en 2007, l'éditeur américain ferme la porte, après un suivi assez médiocre de la gamme, visiblement pensée pour profiter de la vague cinéma (et pour vendre des cartes à collectionner).
A titre personnel, j'ai lu cet ouvrage, mais ne l'ai jamais utilisé. A l'époque, une solution plus élégante est disponible : il s'agit de Tiers Age, un jeu de rôle amateur (écrit par Usher, le futur auteur de Te Deum pour un Massacre, qui reprendra en partie le même système).
Mais tout cela, ce sera pour le billet suivant.
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