jeudi 21 avril 2022

Les Cités Perdues

En préambule, je précise que ce billet ne concerne que la version à deux joueurs des Cités Perdues. Cet incontournable a en effet eu droit à une version permettant d'y jouer de deux à quatre joueurs. Ne pratiquant que son incarnation en duel, je me limiterai à celle-ci dans ce billet.

Illustration Trictrac

Pour de nombreux ludistes, Les cités perdues est un classique et, en le pratiquant régulièrement, on comprend vite pourquoi. Créé par Reiner Knizia, l'un des maîtres du jeu à l'allemande (comprenez par là des règles solides, voire rigides, sur lesquelles se plaque un thème, aussi artificiel soit-il), Sa première édition française était le fait des éditions Tilsit, il y a plus de vingt ans (oh, le coup de vieux !), mais le jeu a continué son petit bonhomme de chemin depuis et n'a pas à rougir devant des boîtes plus récentes. 

Illustration Jedisjeu.net


Le jeu est composé d'un plateau central, comportant cinq emplacements, chacun d'une couleur distincte, et de 60 cartes. Pour chacune des couleurs, existent des cartes numérotées de 2 à 10 et trois cartes "pari". Doté d'une main de 8 cartes, chaque joueur va devoir, à son tour :
  • poser une carte, soit sur le plateau central, soit de son côté du plateau. Dans ce dernier cas, les cartes doivent être posées dans l'ordre chronologique. Chaque série expédition ainsi commencée rapporte le cumul de points des cartes posées, sachant qu'une expédition coûte 20 points si elle est entamée. On a donc tout intérêt à ne se lancer que si on dispose de suffisamment de cartes dans la couleur considérée. 
    Les cartes "pari", qui doivent être posées avant les cartes numérotées, permettent de doubler, tripler ou quadrupler (selon le nombre de ces paris cumulés) les gains (ou les pertes) de l'expédition.
  • piocher une carte, soit dans la pioche, soit sur le plateau central.
La manche s'arrête quand on prend la dernière carte de la pioche. Une partie standard se joue en trois manches. Simple et efficace, donc. 

Alors, oui, il y a du hasard et du risque, mais tout le sel des Cités Perdues consiste à les gérer au mieux et à calculer s'il est raisonnable de poser cette carte ou pas. Pour rappel, Reiner Knizia est docteur en mathématiques : il a probablement ramené du travail à la maison quand il a conçu les règles de ce jeu.

Illustration Milleetunjeux

 
Au passage, ce jeu dispose d'un portage efficace sur BoardGameArena, ainsi que sur le moins connu HappyMeeple (accessible sans inscription). Même si la pratique du jeu de plateau en ligne est loin de valoir celle "en vrai", ces plates-formes offrent une alternative intéressante et, surtout, une bonne façon d'apprendre et de progresser.

Les Cités perdues est, comme je le disais, un grand classique chez nombre de ludistes et ressort régulièrement lorsqu'on doit tuer agréablement une petite demi-heure. Si vous êtes adeptes de ces jeux avec un peu de calcul et où la gestion du risque a son importance, vous devriez y trouver votre bonheur ludique. 

Mais ce n'est pas tout : Iello a récemment proposé une nouvelle édition de ce classique du jeu à deux (qui passa aussi chez Filosofia). Si l'on peut goûter les nouvelles illustrations, dorénavant signées de Vincent Dutrait, on y gagnait également une variante supplémentaire, puisque cette incarnation apportait une couleur supplémentaire. Les parties sont donc un tantinet plus longues, mais le principe reste le même. 


Les Cités Perdues / Lost Cities (le duel)
Auteur : Reiner Knizia
Illustrateur : Claus Stephan/Vincent Dutrait
Editeur : Tilsit/Filosofia/Iello
Prix conseillé : 20 €


mercredi 13 avril 2022

La saison des questions

Ca doit être la saison : les défis rôludiques à base de questions pullulent. Je ne vais pas m'en plaindre, d'une part parce que j'ai initié un questionnaire sur cette thématique (auquel vous pouvez toujours répondre) et d'autre part parce que c'est une bonne façon de mieux se connaître. Cette fois, c'est François Letarte (l'homme derrière la chaîne JDR D30) qui nous relaie dix questions pas piquées des hannetons.
C'est parti !

  1. Le meilleur JDR pour jouer un vampire sans vampire dans le nom ?
    Argh, ça commence mal : je n'ai joué de vampire... qu'à Vampire, justement. Mais ce que j'ai lu de Prédateurs m'avait semblé une alternative intéressante et viable. Même si elle arrive par ouï-dire, c'est donc ma réponse.

  2. Le Meilleur PNJ donneur de quête ?
    Là, c'est plus facile. Caton, le taulier du Club Pythagore de Maléfices, est un excellent moyen d'impliquer les PJ dans les péripéties qui n'attendent qu'eux. Le tout est de le faire de façon plutôt fine. 

  3. Le Meilleur JDR sans combat ?
    J'ai du mal à répondre à cette question (et ne pense pas être le seul dans ce cas) : rares sont les JdR ne proposant pas de règles de combat et c'est plutôt la question du scénario qu'il faudrait poser. En tordant légèrement cette question, on peut donc proposer quelques JdR où le combat n'est pas la solution. Je citerais donc (une nouvelle fois) Maléfices

  4. Le meilleur Snack à apporter à une table ?
    A une époque, les paquets de friandises industrielles avaient leur place pas loin des dés et des feuilles de personnage. Depuis quelques années, on va plus retrouver des chocolats (souvent artisanaux), même si c'est rare. On ne grignote presque plus, aux tables où je fais jouer (mais ce n'est pas une consigne de ma part, c'est venu naturellement). En tout cas, quand je maîtrise (et c'est mon seul rôle actuel sur les tables "réelles"), je ne picore pas, n'en ayant ni le temps, ni l'envie. 

  5. Le meilleur JDR pour faire de l’intrigue politique ?
    Je n'aime pas trop les JdR qui se targuent de jouer sur les intrigues politiques (ou alors, il faut que ce soit subtilement distillé). Mes quelques expériences qui s'en sont rapprochées utilisaient Vampire, ses nombreux clans et les liens entre eux. De mémoire, ces rapports entre factions permettaient de bien faire fonctionner les intrigues. 

  6. Le kickstarter pas encore livré le plus attendu ?
    Flûte, flûte, comme disait l'autre. C'est encore une réponse par défaut qui s'impose. Ayant fortement levé le pied sur les foulancements (parce que les promesses non tenues ne sont finalement pas l'apanage exclusif des politiciens), je n'en ai plus que deux en attente : le premier concerne un jeu de plateau et le second un jeu de rôle. C'est donc ce dernier, Ynn Pryddein, annoncé pour décembre 2020, qui est celui le seul que j'attends le plus. Sauf miracle, ce sera le dernier. 

  7. Le meilleur JDR qui n’est pas disponible en français ?
    Depuis le temps que j'en entends et que j'en lis du bien, je reste étonné que Blue Planet n'ait toujours pas été traduit dans la langue de Cousteau. Il le mérite amplement, je crois. 

  8. Le meilleur JDR post apocalyptique ?
    Là aussi, je regrette de n'avoir jamais tâté du post-apo. Je pense que si j'avais à le faire (et ça me tente parfois), ce serait sous un angle sérieux et sans doute assez européen. Cendres devrait se prêter à l'exercice. 

  9. Le meilleure chaîne JDR ?
    J'ai tendance à picorer sur plusieurs chaînes mais celle qui revient le plus souvent dans mes visionnages reste Rôliste TV

  10. Le meilleur JDR en une page ?
    Le challenge (encore un) qui consiste à écrire un JdR en une seule page a connu, je crois, ses heures de gloire sur le forum CasusNo. S'il m'arrive de jeter un œil dans le coin (sans être inscrit), je serais bien en peine de citer de nombreux jeux publiés dans ce cadre. Quant à choisir le meilleur, je me vois contraint de jouer mon joker !


jeudi 7 avril 2022

Les années Casus, c'est... mal parti !

J'ai relayé récemment le projet de documentaire "Les Années Casus", qui sollicitait un financement participatif sur Gameontabletop. Alors qu'on pouvait s'attendre à la réussite de l'entreprise, il faut reconnaître que c'est un échec. A deux jours de la fin de la durée du financement, le compteur est à environ 6 % des 40 000 € demandés par le porteur de projet. Loin de suivre le modèle traditionnel des foulancements (la fameuse courbe en U), on assiste ces derniers jours à des retraits de participation (je ne vois pas l'intérêt de la manœuvre, puisque les paiements ne sont débités qu'une fois le projet financé). 

Malgré toutes les maladresses qui l'encombraient, je ne peux m'empêcher de regretter ce ratage. Les arguments soulevés par ceux passés pour dire que non, ils n'allaient pas participer, me semblent excessifs : c'est sans doute faute de contreparties "en dur" que ça n'a pas marché, à mon humble avis. 

Espérons qu'il ne soit agi que d'un faux départ. L'histoire du jeu de rôle hexagonal (et notamment des "Années Casus", parce que ce magazine en était bel et bien le porte-drapeau) mérite qu'on la raconte. 

mercredi 6 avril 2022

De bonnes adresses

Il y a des blogs et des sites que je suis depuis un temps certain, voire un certain temps. Histoire de leur donner un coup de pouce ou de leur faire un petit retour, voici un billet en listant quelques-uns, que je partage, en espérant qu'ils attirent votre attention. N'hésitez pas à m'en signaler d'autres, je suis toujours preneur.

  • Illustrateur et créateur, Vianney Carvalho a publié plusieurs articles relatifs à la conception d'un JdR. Plein de réflexions pertinentes et une vue de l'intérieur du game-design, même s'il névoque pas toujours le jeu de rôle, son site contient pas mal d'articles intéressants.
  • S'afficher comme Senior Rôliste ne pouvait que m'intéresser (je dois être un des premiers à avoir revendiqué l'appellation VCI). En plus de portraits de quelques figures majeures de l'histoire du JdR hexagonal, ce site parle de Maléfices (en bien).
  • Toujours sur Maléfices (mais aussi pas mal d'autres jeux, dont parfois des raretés), le blog rôliste d'Arii Stef offre un feedback parfois sans concessions sur les différents suppléments pour ce vénérable jeu d'ambiance. Avec toute l'affection que j'ai pour ce jeu, je suis parfaitement en accord avec les appréciations émises à l'encontre de certains suppléments (n'en déplaise aux spéculateurs). 
  • Enfin, et ce n'est pas un blog consacré au JdR : Aux magiciens ès lettres évoque les belles lettres, les écrivains et quelques anecdotes notables. Quand on peut s'instruire agréablement, l'occasion est bonne à prendre. Et puis, c'est plus fort que moi, quelques-unes des personnalités évoquées dans ces colonnes ont fait (ou feront) leur apparition au détour d'un scénario. 

A bientôt pour une autre fournée de liens fort recommandables !


samedi 2 avril 2022

B.I.A.

J'étais totalement passé à côté lors de sa sortie et c'est à l'occasion d'une discussion avec l'un de mes joueurs que B.I.A. a attiré mon attention. Si on en croit sa fiche du GROG (qui reprend peu ou prou ce qu'annonce l'éditeur, les XII Singes) il s'agit d'un jeu one-shot. J'aimerais bien comprendre pourquoi on lui attribue cette étiquette. Est-ce parce qu'il s'agit d'un jeu "à secrets" (et encore) ou parce que l'auteur considère qu'une fois finie une campagne, on arrête de jouer à B.I.A. ? A mon humble avis, cette appellation n'a aucun sens, dans le cas de ce jeu (et dans la quasi-majorité des JdR). 

Image Philibert

Dans B.I.A., les joueurs incarnent des agents du Bureau of Indian Affairs (l'organisme existe vraiment). Grosso modo, il s'agit d'une incarnation du F.B.I. opérant sur les territoires des native americans. Le surnaturel n'est pas loin et les esprits totémiques peuvent aider les PJ ou, au contraire, devenir des ennemis redoutables. On est donc dans un jeu d'enquête saupoudré d'une pincée de surnaturel (à doser selon les goûts de chacun). 

Livre de base

Au niveau de la présentation, on pourra tiquer sur la taille des livrets (du A5) et, surtout de l'écran (au même format, autant dire qu'il est peu utilisable). Le chapitrage est parfois déroutant : ainsi, la création du personnage est décrite après le système de jeu. Cela m'a semblé maladroit et j'ai râlé plus d'une fois pendant la lecture du livre (livret) de règles. 

Ce système est le fameux dK System. Pour faire bref, lorsqu'une action nécessite un jet de dé, il faudra lancer 1D20, auquel s'ajoutent les atouts dont dispose le personnage. S'il le souhaite, le joueur peut y ajouter un ou plusieurs D6 (le groupe dispose d'une réserve de ces dés). Plus le score est élevé, meilleure est la réussite. C'est simple et immédiatement parlant.
Le pool de D6 dont disposent les joueurs sont les fameux dK. Chaque fois que l'un d'entre eux est utilisé, le MJ le récupère et pourra mes accumuler pour faire tomber des crasses sur les joueurs (dK - des crasses, vous l'avez ?). Ce système générique est ici adapté à l'univers. Les dK représentent les totems des personnages, qui peuvent les aider, mais ce n'est pas sans contrepartie. 

Je reste partagé sur la mise en page : elle regorge de bonnes idées, mais (et c'est surtout vrai dans le livret "Les secrets") n'est pas aidante pour ce qui est de s'y retrouver. Mieux séparer les sections aurait été salutaire. Il faut donc faire un effort et envisager une relecture pour en dégager la substantifique moëlle. 

Les secrets

Le deuxième livret (baptisé "Les secrets") lève le voile sur le surnaturel que propose B.I.A, décrit une tribu amérindienne, évoque le chamanisme et expose quelques cadres de jeu, allant de l'Alaska à l'Oklahoma jusqu'au Nouveau Mexique : c'est une bonne idée, puisqu'on mesure rapidement le potentiel du jeu (et ça dément du même coup le concept du one-shot). Il contient également des scénarios (au nombre de 5, plus quelques pitchs permettant d'en construire d'autres rapidement). A la première lecture, j'avoue n'avoir pas goûté les affaires proposées : elles m'ont toutes parues trop compliquées pour de l'initiation. Quitte à me répéter, les premiers scénarios proposés pour un JdR (souvent ceux du livre de base) sont porteurs d'une mission : ils doivent permettre d'initier des néophytes à l'univers proposé et marqueront l'intention du jeu. 

Deuxième point négatif : la façon dont sont présentés ces scénarios. On y retrouve chaque fois le détail de ce qui s'est passé (et que devront comprendre les PJ) et des paragraphes reliés entre eux par les indices que peuvent relever les PJ. Après réflexion, ces scénarios, que leur structure rend moins lisibles qu'une forme plus traditionnelle, sont une représentation textuelle des cartes mentales qu'on peut tracer lorsqu'on conçoit un scénario (c'est ainsi que je procède, en tout cas, avant de passer au stade de la rédaction, plus ou moins poussée selon l'avenir promis au scénario, oui, je raconte ma vie). Moins lisibles, ils sont cependant rapidement exploitables, pour peu qu'on arrive à se représenter la fameuse carte mentale.

Après décantation, l'a priori un brin négatif que j'avais eu à la lecture des scénarios s'est dissipé, en ce qui concerne leur structure. Si je ne pense pas utiliser (du moins dans un premier temps) les scénarios fournis, ils pourront être utiles en tant que modèles... ou plus tard, qui sait ?

L'écran

L'idée de base dans la gamme de jeux dont fait partie B.I.A. est plutôt noble : tout ce qui est nécessaire pour jouer est fourni, y compris l'écran. Etant donné la taille des livrets, ce dernier est lui aussi au format A5. Soyons clair, ce n'est pas suffisant et je vais devoir bricoler quelque chose pour cacher au regard des joueurs tout ce que j'utilise en tant que MJ.

Bilan

Malgré une première approche qui a failli me rebuter, B.I.A est une belle découverte que ce jeu et il arrive directement dans ma liste de ceux à faire jouer. A condition d'être adepte des scénarios d'enquête et pas totalement allergique au fantastique (qui peut ici s'utiliser de façon très subtile et légère, comme j'en ai l'intention), il doit pouvoir donner de jolies séances, utilisant un territoire encore vierge en matière de JdR (francophone, en tout cas). 

Et après ?

En matière de gamme, B.I.A. propose plusieurs petits suppléments : Ghost Dance, Ya Basta, Wankan Tanka, etc. Si j'en crois le descriptif de notre ami le GROG, chacun d'entre eux décrit un contexte et contient un ou deux scénarios. D'autres suppléments, plus conséquents constituent une campagne à part entière. C'est sans doute la raison pour laquelle B.I.A. s'est vu accoler l'étiquette "one-shot", que je considère inappropriée (oui, je radote, mais j'ai le droit, je suis vieux).
Voilà tout à fait le suivi qui me séduit. Je compte maîtriser B.I.A. prochainement, sans doute sur un scénario de mon cru, avant d'envisager d'utiliser le matériel édité par les XII Singes. Le plus dur sera sans doute de mettre la main dessus. 


B.I.A
Auteur : Franck Plasse
Illustrateur : Matthias Haddad et Maxime Plasse
Editeur : les XII Singes
Prix conseillé : 35 €